Idées lumineuses pour énergies vertes
Articles et stories

Idées lumineuses pour énergies vertes

Le professeur Greta Patzke explique comment elle tente de résoudre les problèmes énergétiques de la planète en cherchant des solutions pour produire une énergie véritablement propre à partir de sources renouvelables.

Madame Patzke, vos recherches pourraient permettre de résoudre le problème de l'énergie. Faut-il s'attendre à d'importantes restrictions?

Non. Je souhaite que nous puissions maintenir notre niveau de civilisation sans nuire aux écosystèmes et à l'équilibre écologique. Je veux développer une technologie qui permettra de produire une énergie 100% propre à partir de sources durables.

Comment comptez-vous y parvenir?

Grâce à la photosynthèse artificielle, qui permet de fabriquer de l'hydrogène en scindant de l'eau avec la lumière solaire. De manière imagée, nous cherchons une poudre magique qui, répandue dans l'eau, produirait de l'hydrogène et de l'oxygène sous l'effet du soleil.

La photosynthèse permet aux plantes de capter l'énergie solaire. Vous voulez donc imiter un processus qui existe déjà dans la nature depuis des millions d'années?

Oui, en principe. Mais les processus naturels ne peuvent pas simplement être reproduits en laboratoire. Imaginez que l'on implante un œil humain dans un robot pour lui donner la vue. Cela ne fonctionnerait pas. Nous cherchons une technologie simple, robuste, bon marché et plus efficiente que la photosynthèse naturelle. 

Je veux développer une technologie qui permettra de produire une énergie 100% propre à partir de sources durables.

Comment fonctionne un catalyseur?

Il existe plusieurs approches. Nous travaillons souvent avec du cobalt. L'été dernier, nous avons publié un article sur un complexe de cobalt, une molécule unique en son genre qui semble réunir les propriétés désirées. Nous voulons maintenant l'étudier. Vous savez, les critères qui sous-tendent la catalyse ne sont pas encore parfaitement compris. C'est comme si l'on construisait cent voitures, et que parmi elles, deux sont excellentes, 48 médiocres et 50 inutilisables, sans que l'on sache pourquoi.

Il faut donc un peu de chance?

Il y a toujours un peu de hasard. Les processus sont tellement complexes qu'il est impossible d'en contrôler simultanément toutes les variables.

Si je comprends bien, la photosynthèse artificielle ne sera pas opérationnelle d'ici à quelques années, mais bien dans plusieurs décennies?

Tout peut aller très vite si l'on trouve un bon catalyseur. Ou prendre du temps si l'on fait chou blanc.

La synthèse artificielle ouvre d'immenses perspectives commerciales, pourquoi les entreprises ne se consacrent-elles pas à ce domaine de recherche?

L'industrie y viendra certainement en cas de percée majeure. Nous n'en sommes encore qu'au stade de la recherche fondamentale.

Nous cherchons une technologie simple, robuste, bon marché et plus efficiente que la photosynthèse naturelle.

Imaginons que nous puissions déjà fabriquer de l'hydrogène proprement et à moindres frais grâce à votre méthode. Qu'en faisons-nous ensuite?

On peut utiliser l'hydrogène dans une pile à combustible pour produire de l'électricité. Ou pour fabriquer des combustibles ou de l'essence artificiels. Ce procédé s'appelle la synthèse Fischer-Tropsch et il a déjà été employé pendant la Deuxième Guerre mondiale.

Il existe déjà les panneaux solaires pour exploiter l'énergie du soleil. Pourquoi aurions-nous aussi besoin de la photosynthèse artificielle?

Le photovoltaïque est une technologie mature et fascinante, mais avec un défaut: elle fournit de l'électricité, impossible de stocker l'énergie, il faut un réseau.

Et ce n'est pas le cas de la photosynthèse artificielle?

Non, l'hydrogène peut être exploité ultérieurement. Cette technologie propre aura sa raison d'être là où il n'y a pas de réseau électrique, c'est certain. Et puis, il ne faut pas se précipiter sur une technologie unique, comme nous l'avons fait avec le pétrole et le gaz.

Comment en êtes-vous arrivée à ce domaine de recherche?

J'ai appris mon métier en commençant en bas de l'échelle, en me consacrant à la recherche fondamentale sur les nanoparticules et les agrégats. Une fois calée sur ces sujets, je me suis dit: je veux donner quelque chose en retour à la société. Me consacrer à la chimie appliquée et aux thèmes d'avenir. Cela n'aurait pas fonctionné sans des bases solides.